L’eau de pluie est à la fois une ressource indispensable et un danger redoutable. Lorsqu’elle manque la terre se meurt. Lorsqu’elle surabonde, elle se noie. Sa gestion, de plus en plus critique face au changement climatique, est prise en compte dans les grandes stratégies environnementales.
Quelle petite pierre le citoyen peut-il apporter à l’édifice avec sa citerne ?
L’entrée en vigueur en Wallonie du Code de l’Eau, Livre II du Code de l'Environnement (composé d'une partie décrétale et d'une réglementaire), a fait évolué notre rapport à l’eau de pluie.
Stocker
La citerne, du moins celle-ci, est un réservoir alimenté gratuitement par la générosité du ciel. Vu le coût de l’eau de distribution, sa gestion de plus en plus tendue et les traitements qu’elle requiert, l’usage de l’eau pluviale est à la fois économique et durable.
Les hommes politiques sensibilisés à la problématique l’ont traduite en exigences réglementaires plus ou moins contraignantes selon les régions.
Le stockage est imposé en Régions flamande et Bruxelles-Capitale. Depuis le 2 octobre 2023, en Flandre, la capacité des citernes a même été augmentée pour les habitations neuves et celles qui sont rénovées avec un minimum de 5000 litres. A Bruxelles, l'obligation porte sur un volume minimum de 33 litres au m² de surface de toiture en projection horizontale en construction neuve comme en rénovation. La Wallonie a fait le choix la sensibilisation et reporte la décision d’imposer ou non sur les autorités communales. Certaines en encouragent l’installation avec des primes et, en 2023, en moyenne 20% des communes l’exigeaient.
Qu’elle soit en béton ou en matière synthétique, chacune de ces citernes a ses avantages et ses inconvénients. Les premières sont moins chères, résistent mieux à la pression ascendante mais vu leur poids sont un peu plus difficiles à poser.
Les secondes, plus onéreuses mais très légères, ont des formes plus variées et sont particulièrement adaptées aux lieux moins accessibles, voire à l’intérieur.
N’oublions pas qu’un stockage de qualité est conditionné par un entretien régulier : tous les ans pour le filtre, tous les 10 ans pour la citerne (évacuation des boues et nettoyage).
Consommer
L’eau de pluie est par défaut considérée comme non potable (les traitements nécessaires à sa potabilité ne seront pas abordés ici).
- Elle ne peut donc être utilisée pour, entre autres, boire, cuire des aliments, se laver y compris se doucher car les gouttelettes en suspension peuvent être absorbées.
- Elle convient à des usages dit inférieurs tels que chasse d’eau, lessive, arrosage des plantes, ... qui sont heureusement de gros consommateurs.
- Elle ne peut en aucune cas être en contact avec l’eau de distribution afin d’éviter les contaminations.
Les deux circuits seront totalement séparés.
Si vous souhaitez néanmoins prendre une douche avec de l’eau de pluie, le circuit devra rester séparé y compris pour la production d’eau chaude. Une signalisation est à apposer. Des traitements complémentaires sont nécessaires (filtres, UV). En finalité, en tant que particulier, le coût d’une telle installation n’est pas raisonnablement amortissable sans oublier la contrainte des entretiens réguliers.
Si votre citerne est vide, basculer sur le réseau d’eau de ville en tournant une vanne est strictement interdit bien que ce genre d’installation soit encore présent dans le parc immobilier existant. Il ne vous reste qu’à prendre votre plus beau tuyau d'arrosage, soulever le couvercle de visite et remplir votre citerne d’eau de ville en veillant à ce que :
- la sortie du tuyau ne soit pas en contact avec l’eau de la citerne;
- personne n’y tombe.
Les plus prévoyants auront pensé à installer un kit de remplissage manuel ou automatique qui assure un remplissage à l’aide d’un entonnoir et d’une alimentation sans contact direct avec ce dernier.
Il est d’ailleurs conseillé de ne pas laisser descendre trop bas le niveau d’eau dans sa citerne car celles en matériaux synthétiques risquent de remonter et, pour toutes, la qualité de l’eau se détériore.
Evacuer
Et quand la citerne est pleine, peut-on simplement rejeter l’eau dans l’égout public ? Si cette pratique a longtemps été l’usage, elle est désormais interdite pour les nouvelles constructions. Le rejet d’eau de pluie doit être dissocié de celui des eaux usées (grises et noires). Même si aujourd’hui, elles se retrouvent toutes deux dans le même égout public, la dissociation doit être prévue afin d’en permettre le raccordement différencié lorsque le réseau public de collecte sera divisé.
En Flandre comme en Wallonie, l’eau de pluie excédentaire doit désormais retourner au sol via un système d’infiltration.
La mesure vise à limiter la saturation des réseaux d’égouttage et se pose en solution pour deux problèmes qui entachent le fonctionnement des stations d’épuration :
- la dilution des effluents → le traitement perd en efficacité et la fluctuation de la dilution rend le paramétrage plus difficile;
- l'excès d’eau jusqu’à la saturation en cas de fortes pluies → à saturation, les vannes sont ouvertes et tout le contenu repart vers les eaux de surface sans traitement.
Pour de petits volumes et si le terrain le permet, un simple drain de dispersion peut suffire (tant en surface qu’en absorption). Mais dès que le volume d’eau augmente, d’autres installations sont nécessaires. De nouvelles solutions sont apparues sur le marché. C’est ainsi que des fabricants comme la société ecobeton, ont développé des cuves de dispersion en béton à porosité très élevée.
Se retrouvent donc sur le marché trois types de cuve :
- pour la rétention pure : la citerne, étanche
- pour la rétention et la dispersion : la citerne étanche jusqu’à une certaine hauteur, poreuse au-delà
- pour la dispersion pure : la cuve entièrement poreuse. La Febe nous rapporte dans sa revue Béton de mars 24 que cette solution a été adoptée pour le magasin Aldi de Chimay confronté au problème du volume d’eau généré par sa surface de toiture. La surface d’infiltration insuffisante et le sol schisteux ont imposé le recours à des cuves de dispersion. Le choix a porté sur Z-tank, le modèle mis au point par ecobeton.
S'informer
Toute cette histoire vous tracasse ? Vous avez des doutes sur la conformité de votre installation ? Faites passer un certificateur agréé CertIBEau poru un audit. Sachez que, si vous demandez un nouveau raccordement à l’eau potable, son passage est obligatoire. La certification, d’application depuis le 01/01/2021, portera sur la distribution d’eau à l’intérieur du logement ainsi que l'évacuation et le traitement des eaux urbaines résiduaires et pluviales.
CertIBEau a également fait l’objet d’un article dans la revue Contact de juillet-août 2022 de Builddwise : « CertIBEau : quel est l’impact en Wallonie ? » qui porte sur les conséquences de la certification et les non-conformités les plus fréquentes.
Vous souhaitez en savoir plus ? Consultez le Code de l’Eau d’application en Wallonie.
Sources :
- « Obligatoire d’installer une citerne d’eau de pluie ? », Rodolphe Masuy, 22/02/2023, www.plusmagazine.be
- « Citerne d'eau de pluie : fonctionnement, primes et prix », Liesbeth Pairoux, www.livios.be
- www.wallonie.be
- « Nouvelles solutions contre les infiltrations chez ecobeton », 11/02/2019, www.architectura.be
- www.eco-beton.be
- www.certibeau.be
- « Quand l’architecture est économe en eau », LDV Studio Urbain, 21/03/2024, www.demainlaville.com
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