Si je vous dis DNSH, ne croyez pas qu’il s’agisse d’une nouvelle algarade digne d’Harchibald Haddock.

Loin de là, cette mesure est dans la lignée d’un évènement dont nous nous souvenons tous, ou presque.

En décembre 2015, La COP21 est restée dans les mémoires sous l’appellation « Accord de Paris ». 

Climat : l'accord de Paris expliqué à ... ma collègue (cncd.be)

C’est, depuis Kyoto en 1997, un accord important. Pour la première fois, les objectifs sont volontaristes, chiffrés et contraignants pour les états. C’est en cela que ce texte est historique.

Les objectifs de ce texte sont de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C par rapport à la période préindustrielle (+/-1850 à peu près). Conformément à l’objectif de l’Accord de Paris, il convient de réduire les émissions de GES (Gaz à Effet de Serre) à 45 % à l’horizon 2030 et d’atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici à 2050 !

C’est ambitieux, mais est-ce réaliste ?

Il est un peu difficile de se rendre compte de ce que représentent ces chiffres dans notre quotidien.

A taille humaine et individuelle, c’était difficilement perceptible en décembre 2015, mais depuis quelques années, les évènements climatiques se succèdent les uns aux autres, et on se rend bien compte qu’un « certain dérèglement du climat » est en cours.

En 2021, il est constaté un Réchauffement planétaire (climat.be) déjà acquis de 1.11°C. Vu l’inertie du phénomène, on s’approche de la limite des 1.5°C et il y a donc urgence de prendre des mesures à la hauteur du problème.

Il faut bien reconnaitre que jusqu’à présent, et malgré les alertes du monde scientifique, on n’a pas vraiment vu la couleur du changement, hormis le vert du Greenwashing. Et pourtant, vu la situation il y a urgence !
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L’accord de Paris, il a changé nos vies ?

L’Accord de Paris, c’est la décision politique qui marque la volonté d’entrer dans un monde à zéro émission nette. L’UE a donc traduit en directives et mesures concrètes, l’accord politique de Paris. Le DNSH est l’un de ces textes.

Que nous dit-il ?

DNSH (=Do Not Significantly Harm) est la volonté de ne pas aggraver la situation du changement climatique, et même de pouvoir, dans la mesure du possible, améliorer la situation ! Le texte n’aborde donc pas que l’aspect climatique, il englobe également l’environnement en général.

La conséquence directe de ces textes est que les projets financés par le plan de relance l’UE doivent se conformer au principe durant tout le cycle de vie du projet. Le respect de ces dispositions conditionne donc le financement des projets. En d’autres termes, les projets qui ne respectent pas le principe DNSH ne seront plus financés par l’UE ! Cela concerne les projets et bâtiments publics des états membres de l’UE. 

En Belgique, le gouvernement fédéral prévoit de l’utiliser systématiquement pour tous les investissements et les politiques d’infrastructure liées au plan de relance. Compte tenu de cette volonté, le principe DNSH deviendra, à terme, une nouvelle norme.

L'application du principe DNSH, tel que défini dans le Règlement taxonomie (2020/852), demande qu'aucun préjudice important ne soit causé aux 6 objectifs environnementaux. Ces six objectifs sont (article 9) :

  1. l’atténuation du changement climatique,
  2. l’adaptation au changement climatique,
  3. l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines,
  4. la transition vers une économie circulaire,
  5. la prévention et la réduction de la pollution,
  6. la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

 

 « RÈGLEMENT (UE) 2020/852 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088 » https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32020R0852&from=F

  

Le détail de ces 6 points :

  1. l’atténuation du changement climatique

L’objectif est de stabiliser les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES). Réduire les émissions ou améliorer l’absorption des GES par des processus ou des produits y contribue utilement. Dans cette logique :

  1. améliorer l’efficacité énergétique de l’enveloppe des bâtiments par l'utilisation de matériaux neutres en carbone ou capteurs de carbone (puits de carbone terrestres), ou en utilisant des matières renouvelables issues de sources certifiées durables,
  2. prévoir l’usage et la production d’énergies renouvelables,
  3. penser la mobilité plus vertueuse et la développer propre ou neutre pour le climat,

Lorsqu’il n’y a pas de solution « sobre en carbone » réalisable sur le plan technique et économique, une mesure qui favorise la transition vers une économie neutre pour le climat, alignée aux accords de Paris est acceptable :

  1. supprimer progressivement les émissions de GES, en particulier celles provenant des combustibles fossiles solides
  1. l’adaptation au changement climatique

L’objectif est de réduire sensiblement les risques d’incidences négatives du climat actuel sur l’activité économique, la population directe et mais également indirecte, ses biens, et la nature.

  1. l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines

Assurer le bon état des masses d’eaux en général qu’elles soient de surface ou souterraines. La prévention de la détérioration des eaux est également visée. Dans cet esprit :

  1. protéger l’environnement et la santé des populations des rejets des eaux usées industrielles
  2. améliorer la gestion de l’eau, par l’utilisation raisonnée et durable, la réutilisation des eaux, la réduction de la pollution, l’atténuation des effets des inondations et des sécheresses, et toute autre activité de protection et d’amélioration de la qualité des eaux
  1. la transition vers une économie circulaire

Avoir une contribution substantielle à la transition vers une économie circulaire implique :

  1. de concevoir « à minima » pour une longue durée, et, idéalement pour la déconstruction,
  2. de prolonger la vie des produits, de prévoir la réparabilité, l’évolutivité, de favoriser le réemploi, le recyclage, le reconditionnement
  3. d’utiliser des ressources naturelles de sources durables
  4. de réduire la consommation de matières premières primaires et d’énergie
  5. de diminuer la production des déchets, la mise en décharge (et les dépôts sauvages), l’incinération 
  1. la prévention et la réduction de la pollution

Protéger l’environnement contre la pollution implique :

  1. une réduction des émissions de polluants de l’air, de l’eau et du sol, autres que les GES.
  2. d’améliorer la qualité de l’air, de l’eau et du sol 
  1. la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Protéger, conserver ou restaurer la nature en général, maintenir la biodiversité et les écosystèmes implique :

  1. d’empêcher la détérioration, de préserver les habitats naturels, de restaurer, d’améliorer ou à minima de diminuer l’impact humain sur les écosystèmes aquatiques et terrestres,
  2. de gérer les terres durablement, en protégeant la biodiversité des sols, assainir les sols contaminés
  3. des pratiques durables en matière d’agriculture, de gestion des forêts et des arbres afin de se prémunir de ces dégradations et de la déforestation

 

Approche de la méthode DNSH

  • Le DNSH doit prendre en compte l’ensemble du cycle de vie du projet.
  • Les impacts directs et les principaux impacts indirects sont visés : construction et utilisation du projet.
  • L’évaluation DNSH (législation de l’UE) est distincte de la règlementation de l’Etat membre (permis, PEB…), elle ne dispense donc pas de la législation en vigueur qui doit être respectée !
  • Le résultat d’analyse DNSH d’une mesure est conforme à 100% ou non conforme, sans demi-mesure !
  • Les experts « DNSH » tels quels ne sont pas encore sur le marché. Il s’agira pour les domaines techniques du projet d’identifier la personne qui peut évaluer les possibles impacts sur les 6 objectifs environnementaux du DNSH. Vu la situation transitoire et en attente de clarification, la conformité peut se baser sur des preuves et des documents y faisant état tels que :

- Permis
- rapports d’audits, rapports d’experts
- documents de certifications, rapports PEB, et rapport d’étude d’analyse du cycle de vie. En Belgique l’outil TOTEM est particulièrement adapté et il est donc à privilégier
- Labels de durabilité (VALIDEO, BREEAM, LEED, HQE, GRO…)

 

A suivre → "Le DNSH… Quesako ? Incidences (2/2)"

 

 

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