Les façades décapées appartiennent au visuel paysager d’aujourd’hui. Il n’en a pas toujours été ainsi.

Par le passé, elles étaient protégées d’un badigeon à la chaux. Il nécessite un entretien régulier. C’est contraignant.

En 1878, un brevet est déposé pour une peinture minérale au silicate de potassium. Une r.évolution !

Façades nues

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Si les façades mises à nu (sablage, par exemple) sont à la mode, il est faux de croire à l’absence d’entretien.

Impossible de stabiliser les caractéristiques des briques sur toute une production avec les anciennes méthodes de cuisson. Résultat : des briques pas assez, trop ou inégalement cuites dont les propriétés varient. Un tri d’usage est nécessaire. Les moins cuites, moins résistantes et très poreuses, seront réservées à l’intérieur (parois et remplissage d’ossature). Les trop cuites, noires en tout ou en partie, si elles peuvent être utilisées pour les murs extérieurs, posent un problème esthétique. Les maçons les éviteront en surface visible. Restent les autres, de la parfaite à la limite. Vous reconnaîtrez de suite la parfaite, les limites présentent des traces de surcuisson ou ont été rongées par le sablage, délitées par le gel, …

Bref, un traitement est inévitable pour éviter leur dégradation mais attention pas n’importe lequel. Pour conserver pendant longtemps un bâtiment sain et en bon état, il conviendra de veiller aux qualités naturelles de cette maçonnerie notamment au niveau du comportement hygrothermique et de réitérer les traitements en temps utile.

 

Façades enduites

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Le badigeon à la chaux assure une excellente protection de la façade. Ses propriétés sont en parfaite symbiose avec le support. Mais il doit être entretenu très régulièrement et ce, d’autant plus que les conditions climatiques sont sévères. La météo de Provence ou de Grèce est loin de celle de l’Ardenne ! Plus les conditions sont rudes, plus l’entretien est essentiel à la préservation du bâtiment, plus sa fréquence augmente.

Une alternative est brevetée par le chimiste allemand Adolf Wilhelm Keim en 1878 : une peinture minérale au silicate de potassium, toujours commercialisée de nos jours.

Tout comme un badigeon à la chaux, elle respecte le comportement hygrothermique de la paroi mais sa longévité n’est pas comparable. Une amélioration notable. Elle est dite minérale (si moins de 5 % d’additifs organiques) et fusionne littéralement avec son support. La réaction chimique qui se produit avec la brique crée une liaison irréversible entre les deux matériaux. Les entretiens ultérieurs consisteront principalement en un nettoyage - dépoussiérage de la surface dans un souci plus esthétique que conservatoire. Si le coût d’une application de badigeon peut être inférieur (tout dépend des couleurs), sur le long terme, la plus-value des peintures aux silicates n’est plus à démontrer.

Pour en savoir plus :

Pour les bâtiments historiques, le recours à la peinture aux silicates est une solution très intéressante même si des freins peuvent se présenter :

  • le coût (plus souvent une argumentation commerciale qu'une réalité de terrain)
  • la substitution de produits
  • la présence de sels (dommageable dans tous les cas aussi bien pour les solutions à base de chaux que de silicate).

Réfléchir ?

Et pour les autres ? Pourquoi ne pas élargir le débat ?

Le citoyen lambda intègre naturellement dans sa notion du « beau » une maison ancienne à la brique décapée. Le regard porté sera plaisant et ce, d’autant plus que quelque généreux géranium vienne la fleurir. Un effet de mode s'est invité dans ses références culturelles. Sur la même façade, le regard du spécialise en patrimoine sera à tout le moins triste, si pas consterné. Le géranium ne lui cachera pas l’érosion des briques. Nous l'avons vu, historiquement, ces façades étaient enduites pour les protéger. Non seulement, la perception visuelle était toute autre mais enduit et maçonnerie formaient un complexe interdépendant qui assurait la pérennité du bâtiment. Décaper (ou isoler) modifie le comportement du mur. Une mauvaise compréhension de cette délicate alchimie peut accentuer l’altération des matériaux jusqu’à entraîner la destruction du bâtiment.

Puisque la question de l’entretien est revenue sur la table, celle du regard sur l’architecture ne pourrait-elle, elle aussi, être reposée ?

Qu’en pensez-vous ? Façades nues ou enduites ?

 

 

Source : « Peintures aux silicates : spécifications produit et mise en œuvre pour l’extérieur – fiche d’aide à la rédaction de cahiers des charges (FARCC n° 4.1) », Jean-Christophe Scaillet, La Lettre du Patrimoine n°61, 01-02-03/2021, Wallonie patrimoine AwaP, pages 7-10
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