immeubles_appartements_Droixhe_By_ MerlinAinsi l’architecte Anne-Michèle Janssen introduit-elle la journée consacrée à la rénovation durable au salon Bois & Habitat.

Pourtant les contraintes rencontrées en rénovation ne sont-elles pas incompatibles avec celles de la PEB ? Ne vaut-il pas mieux de tout démolir et reconstruire sur une base saine ? Gauthier Wislez, architecte, a magistralement fait la preuve du contraire avec la rénovation de la résidence ‘La belle jardinière’ à Angleur.

L’immeuble est une barre d’appartements comme il en existe un peu partout à travers le monde, y compris à Bruxelles, Charleroi, Angleur ou à Droixhe.

A Droixhe, les tours sont progressivement rasées dans l’espoir désabusé qu’elles emportent dans leur néant la violence endémique du quartier.

A Angleur, Le Logis social de Liège, propriétaire de la barre de 211 appartements, a choisi de rénover. L’immeuble, construit en 1959, était considéré à l’époque comme un bâtiment exemplaire. Il le redeviendra, tel est le souhait du Logis social. Le défi est d’envergure, le budget serré (450 €/m²).

 

Le bâtiment, à ossature en béton armé avec des façades préfabriquées en béton, est orienté est-ouest. Il comporte 13 niveaux, pour 120 m de longueur, 12 m de largeur et 41 m de hauteur. Comme il est repris à l’inventaire du patrimoine, le bureau AW architectes sprl est obligé de respecter les lignes de force des façades. A noter que le système de chauffage est toujours d’origine. Les besoins en énergie se montent à 360 kWh/m²/an. Le renouvellement d’air est estimé à 7 volumes/heure.

La rénovation a consisté à littéralement emballer le volume. Cette enveloppe est réalisée à partir d’une structure bois recouverte de panneaux en fibre de bois constituant des caissons dans lesquels est insufflée de la cellulose. La finition est assurée par un crépi et un bardage en plaques ondulées. Certains détails et ponts thermiques ont été traités en particulier. Les nouveaux châssis sont équipés de triple vitrage et entourés de bavettes d’étanchéité à l’air. En toiture, une couche de 20 cm de laine de roche a été ajoutée sur les 5 cm de Foamglass déjà en place, l’étanchéité existante servant de pare-vapeur. Les besoins en énergie se montent maintenant, en moyenne, à 28 kWh/m²/an et le renouvellement d’air a été imposé à 1 volume/heure.

 

Une économie d’1,5 million d’euros a été réalisée en supprimant le chauffage alors qu’initialement, le maître de l’ouvrage envisageait d’installer 211 chaudières individuelles pour éviter les litiges liés aux décomptes. Comme une ventilation double flux était de toute façon nécessaire, elle assure aussi la fonction chauffage vu les faibles nouveaux besoins en énergie. Chaque façade longitudinale a son groupe. Ils peuvent ainsi fonctionner différemment en fonction de l’ensoleillement.

L’eau chaude sanitaire est produite par une chaudière à pellet située à la cave. Elle chauffe aussi l’air pulsé au niveau des groupes garantissant 18° en hiver par -15° extérieur. Un appoint (qui restera très ponctuel) peut être apporté par un radiateur électrique.

L’installation électrique a été améliorée avec l’ajout de détecteurs de présence et crépusculaires. A l’intérieur du bâtiment, seules les salles de bains et les cuisines ont été rénovées.

 

Un accompagnement est également prévu afin d’expliquer aux locataires comment occuper le logement en bon père de famille avec les transformations qui y ont été apportées. C’est essentiel pour leur bien-être, la salubrité des lieux et une gestion technique efficiente.

 

Quelques astuces et points d’attention

Les astuces

Les châssis ne sont pas oscillo-battants mais simplement ouvrants. Lorsqu’il pleut, par grand vent ou temps froid, les occupants auront tendance à les fermer. Il y aura donc moins de perturbation dans l’équilibrage de l’installation double flux.

Pour augmenter le confort et la sécurité, l’accès aux caves est dorénavant interdit aux locataires. Des locaux poubelles ont été aménagés au rez-de-chaussée. Chaque ensemble d’appartements a désormais sa propre entrée individuelle (4 pour toute la barre). Le sentiment de responsabilité des occupants s’en trouve augmenté, les errances et dégradations diminuées.

Pour éviter les ponts thermiques, les balcons ont été supprimés et réintégrés dans le volume de la cuisine.

Les points de vigilance

Comme la ventilation assure aussi le chauffage, les diamètres des gaines ont dû être augmentés. L’encombrement n’est pas à négliger, surtout qu’il faut isoler ces conduits.

Des problèmes sont apparus avec le crépi sur isolant au droit des battées de fenêtres. En fait, l’isolant n’est pas découpé correctement. Les ouvriers, en moussant les trous, les cachent sans les remplir. Cette malfaçon est détectée en appuyant sur la mousse : le doigt passe à travers.

Pour injecter correctement de la cellulose à 41 m de hauteur, les machines doivent être plus puissantes.

Pour éviter les feux de façades et garantir une résistance au feu de 2 heures, des précautions particulières ont dû être prises : application de laine de roche sur la membrure en béton et cadre en Promat autour des châssis.

 

Quels sont les atouts d’une telle démarche ?

  • Plus économique et moins long qu’une démolition-reconstruction 
  • Pas de déracinement. Les logements sont rénovés progressivement. Le réseau relationnel et social est intact.
  • Comme la plupart des bâtiments similaires de cette époque, l’immeuble et son quartier accusaient une image très détériorée. Le quartier a trouvé une nouvelle dynamique et les gens sont fiers d’habiter un bâtiment performant.
  • La qualité de vie augmente ainsi que la salubrité des locaux. L’argent consacré au chauffage peut être réinjecté dans le budget familial tout en bénéficiant d’un meilleur confort.

 

Le chantier a démarré à l’été 2012. La première des 8 phases s’est terminée fin mars 2013. A l’issue du chantier, prévue en 2014-15, l’émission de 26092 tonnes de CO2 sera économisée chaque année.

 

Sources :

- Mot d’introduction et commentaires de Madame Anne-Michèle Janssen, Architecte, Professeur à l’ULg et présidente de la journée de la ‘La rénovation durable’, 22/03/2013, Salon Bois & Habitat, Namur
- ‘Résidence ‘La belle jardinière’ à Angleur, rénovation d’un building de 211 appartements’, Gauthier Wislez, AW Architectes SPRL, journée de la ‘La rénovation durable’, 22/03/2013, Salon Bois & Habitat, Namur
- questions du public participant à la journée de la ‘La rénovation durable’, 22/03/2013, Salon Bois & Habitat, Namur
- illustration : « Vue de Droixhe», J.M. Merlin, 31 juillet 2007, GNU Free Documentation License, Version 1.2,  commons.wikimedia.org. L’utilisation de cette illustration n’engage en rien son auteur sur un soutien ou un entérinement éventuel du contenu de l’article.

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