Les insolites
Vous connaissiez déjà Vessel, un escalier métallique labyrinthique à New York.Voici une autre création originale : StairStalk, l'escalier tige.
Cet escalier bois-acier, extraordinaire, s’élance avec une fougue toute végétale sur 3 étages du prestigieux restaurant Hide au #85 Piccadilly - Londres.
Son anatomie organique tire son inspiration de la force de vie qui pousse une plante vers la lumière. Ses marches se déploient comme des feuilles autour de la structure centrale. Il se tord, déploie les rameaux – fuseaux de sa rampe autour du bar du premier étage pour se fondre dans les murs au troisième.
Imaginez-vous …
... la passion du Bureau d’architecture et design Atmos à le concevoir ?
... la concentration des ingénieurs en structure Heyne Tillett Steel (HTS) à le calculer ?
... le plaisir des artisans de Trabczynski / GD Staircases à le construire ?
... le régal sensoriel des consommateurs à le parcourir ?
Donnons la parole à Atmos
L'escalier prend racine par une simple marche concave, en retrait, une invitation au voyage dans le monde fabuleux des contes de notre enfance. Il évolue en une courbe de plus en plus saillante avec une crête centrale pour la circulation rapide et des vallées dentelées pour des trajets plus calmes et plus lents.
L'escalier glisse le long d'un mur vitré à sa gauche, brillant de la lueur ambrée des alcools sophistiqués. De l'autre côté, le mur dissimule l’ascenseur. Tout comme les deux bords du plafond, ce mur ondule et dépasse pour infléchir magnétiquement la géométrie de l’escalier. StairStalk se libère et son limon intérieur monte comme un élément structurel flottant, en supportant tout le poids jusqu'à ce qu'il se raccorde à la mezzanine ultime.
La structure est plus grande qu’elle n’y paraît : 5 mètres de diamètre, avec un vide central d'un mètre.
La rampe intérieure se fend lorsqu'elle touche le sol pour former une ramification qui entoure ce vide. Telle une liane, elle bifurque vers le haut, se déroule pour former le nez de la marche et, de ramifications en ramifications, se fond dans le limon d'où elle jaillit comme un toron épais et robuste qui forme finalement la main courante extérieure, glissant vers le haut, avant de s'enrouler autour du mur vers l'ascenseur.
Aucune ligne ne se répète. Toutes les foulées sont différentes. Chaque étape apporte sa part unique à une séquence algorithmique en constante évolution.
Structures et finitions
L'escalier inférieur est soutenu par une combinaison de sous-structures en acier et en contreplaqué, selon la composition des murs adjacents. Ce dernier est fabriqué par stratification et collage de lamelles en placage de chêne. Elles sont assemblées sur des moules incurvés et poncées à la main pour former une structure en bois curviligne complexe dont le grain visible en suit, comme par magie, le cheminement.
La partie supérieure de l’escalier, flottante, fait sa jonction à la dalle composite de béton et d'acier de la mezzanine par un raccord en acier sur mesure.
Comme le limon intérieur remonte du rez-de-chaussée à la mezzanine, servant de support structurel principal à cet escalier qui semble voler librement, une analyse 3D complexe (OASYS GSA) a montré qu'il était soumis à une énorme flexion. La conception a donc évolué en un modèle structurel de bois armé gainant une série de tubes creux (RHS) en acier. Ils sont interconnectés délicatement pour fournir la stabilité structurelle nécessaire ainsi que pour amortir les vibrations perceptibles lors de l’utilisation.
Toutes les marches en porte-à-faux au-dessus du sol ont été renforcées avec des plaques de 10 à 15 mm en acier inoxydable, recouvertes avec un contreplaqué structurel et reliées entre elles par des tiges d'acier courtes et minces. Ici aussi, l'analyse a montré qu'un renfort était nécessaire en cas de chargement extrême si bien que les plus petites sections de la RHS ont été dissimulées dans les trois poteaux «fibreux» sinueux qui entourent les bords extérieurs de l'escalier et fusionnent ensuite à l'intérieur de la main courante. Ils ont géométriquement transformé la forme extérieure des marches. Les tolérances très sévères au niveau du noyau en acier ont rendu son intégration extrêmement difficile. Les menuisiers ébénistes ont dû faire preuve d’une précision et d’un soin exceptionnels mais elles sont totalement indétectables.
Fabrication en quelques chiffres
Trabczynski / GD Escaliers est une entreprise spécialisée dans la conception et la construction d'escaliers de luxe basée en Pologne. Elle maîtrise une méthode unique de construction en bois cintré par placage stratifié qui donne l'illusion du bois massif. Désignée comme maître d’œuvre, elle a développé des méthodologies de communication, d’organisation et de fabrication spécifiquement adaptées à ce projet complexe.
- Pas moins de 2000 fils de discussion par courriels ont été nécessaires.
- Plus de 4000 heures ont été consacrées à la traduction des données de conception et à la supervision.
- 12 personnes ont à un moment à un autre fait partie de l’équipe associée à la fabrication.
- Construit comme 1 élément préfabriqué unique, il est divisé en 2 suite à une étude approfondie du site, un recoupement des dimensions et … la limite de la hauteur du toit de l'atelier.
- 4 500 m2 de placages minces en chêne participent à la structure principale.
- 150 m² de placages épais de 5 mm + le chêne les complètent pour revêtir les dessus des girons (ainsi que tous les dessous visibles).
- Les girons ont été renforcés avec 3,5 m3 de contreplaqué, les seuls éléments à être découpés numériquement par machine CNC, alors que tout le reste a été tracé et coupé à la main.
- Plus d'une demi-tonne de colle polyuréthane intervient pour assembler tous ces bois. Elle prend des semaines pour durcir mais cette nouvelle colle renforce la solidité de la sous-structure en bois composite et contribue à la stabilité de l'ensemble.
- 8 voyages sont organisés pour l'expédier jusqu’à Londres.
- 6 hommes ont travaillé jour et nuit chez Hide pour assembler ses éléments, masquer et poncer leurs jonctions, colorer et finir la pièce entière.
Alors, un simple escalier ?
Ou un projet qui germe, s’enracine et déroule ses vrilles pour danser dans l’espace ?
Une atmosphère féérique et végétale qui fait écho aux présentations culinaires étonnantes du chef étoilé Ollie Dabbous ?
Une expérience ludique et esthétique pour les clients du Hide #85 Piccadilly ?
Plus d'info et de photos sur le site : www.atmosstudio.com
Sources :
- « StairStalk – a stair for HIDE at 85 Piccadilly », 03/05/2018, www.archilovers.com
- www.atmosstudio.com
- communiqué de presse du Bureau d'Art - Architecture - Design Atmos
Source des photos : © Alex Haw, Ducan Smith, Joel Knight , Phil Watson, Anatoleya, Photographes, avec l’aimable autorisation d’Atmos Studio