Circuit Eco-matériaux - Greenov
Le terrain les séduit. Une sensation de paix s’en dégage... en harmonie avec leur envie d’éco-construction. Sa configuration en rend le prix accessible à leur budget, pour un bien situé en Brabant Wallon. Les autorités seront-elles d’accord avec leur projet, original ? Avant de se lancer dans un achat coup de cœur, contact est pris avec l’urbanisme, la commune et la région. Leur projet est accueilli favorablement. D’autant plus que ce terrain boisé est reculé, en forte déclivité et déjà occupé par un ancien chalet à l’abandon qui figure néanmoins au cadastre. Ils reçoivent un accord de principe pour une construction de 75 m² au sol, rez + un étage dans le toit... parfait pour leur idée.Leur projet ?
Un zome, une habitation polyédrique avec une structure en bois légère composée de losanges préfabriqués agencés sous forme d’une double spirale. Ce concept n’est pas récent, puisqu’un des visiteurs des journées portes ouvertes a rapporté avoir fait le tour des zomes de France, trente ans plus tôt.
La maison pomme de pin, ainsi qu’ils l’ont baptisée, a un volume très compact, ce qui est intéressant au niveau thermique, économique et empreinte écologique.
L’aménagement
Le rez-de-chaussée comprend une grande pièce à vivre avec la cuisine et, derrière le poêle de masse, la toilette sèche et la salle de bains qui sera chauffée par le mur arrière du poêle. Une chambre ou un bureau viendra compléter l’ensemble. En l’attente d’une chape de finition, la famille vit pour le moment sur la dalle de sol isolée. L’étage est actuellement entièrement libre. Des tentes clic-clac délimitent l’espace de nuit de chacun des enfants. Des chambres mezzanines en alcôve seront créées en périphérie à l’étage par la suite afin de conserver l’espace libre au centre sous l’étoile.
Les travaux
Les fondations
En mars 2013, l’ancien chalet en bois est démonté et ses composants revalorisé via le parc à conteneur. Les anciens châssis simple vitrage, portes, volets et les pannes faîtières sont conservés pour une utilisation ultérieure (petites serres au sol pour semis, poulailler et abri bois). Les arbres sont coupés pour dégager un accès vers la zone à bâtir, pas trop large, voitures et camions restent au bas du terrain. Le mois suivant, le terrassement est réalisé en décagone par Gaetan Belot. Les semelles de fondations périphériques sont coulées dans le même temps. La maçonnerie enterrée suit, réalisée en blocs Stepoc arrondis sur tout le périmètre du futur bâtiment et quatre plots individuels sont prévus pour les poteaux intérieurs. L’espace central est rempli de verre cellulaire en vrac sur 30 cm, assurant l’isolation et le drainage. Efficace, nous dit la propriétaire, qui raconte s’y être promenée en chaussettes le lendemain d’un orage violent sans avoir eu les pieds mouillés. L’extérieur de la fondation est aussi isolé (ceinture de verre cellulaire avec un drain) et recevra ultérieurement une terrasse.
L’épuration
Pour être conforme aux exigences de la Région Wallonne, une station d’épuration individuelle de 5 équivalent-habitant a dû être construite. Elle est constituée d’un drain alvéolé de 30m enterré, qui permet la prolifération de bactéries responsables du traitement des eaux usées grâce à un système de ventilation naturelle. L’ensemble fonctionne sans électricité et sans entretien... Surcoût d’un tel dispositif qu’ils auraient souhaité éviter puisqu’ils fonctionnent tout à fait bien avec une toilette sèche.
La dalle de sol
La dalle de sol intérieure est réalisée lors d’un chantier participatif en béton de chaux (1/3 argex 1/3 chaux et 1/3 sable). Une armature en nattes de bambou tressé (par les propriétaires) y a été insérée. Ce n’était pas obligatoire mais préféré vu les 5 tonnes du poêle de masse qu’elle devra supporter en son centre.
L’idée d’un garage sous le rez n’a pas été retenue, les propriétaires préférant conserver un grand « jardin-forêt » en lieu et place d’une large allée de garage, reléguant la voiture sur un parking en pierres de sable à front de rue (où un ancien garage en béton lui aussi cadastré préexiste d’ailleurs déjà).
Le zome
L’entrepreneur spécialisé dans ce type d’habitat (conception Pascal Edeline, nenuphar.be® – Isographic) est venu déposer l’ossature bois préfabriquée, non montée. Les propriétaires font appel à l’équipe ; amis charpentier et éco-constructeur professionnels, Benoît Vanherenthals et Gauthier Nagant, pour assembler toute la structure géodésique. Sur les parois verticales, elle reçoit en finition extérieure un bardage en tuiles de cèdre posé en quinconce par les propriétaires. La toiture est végétalisée, elle retient l’eau et donne un peu d’inertie au toit. La couverture se compose d’une membrane d’étanchéité sur laquelle ont été posés de grands géotextiles en forme des losanges, agrafés entre pour eux faire une espèce de gros bonnet sur tout le toit. L’entrepreneur est venu y dérouler, quelques jours avant notre visite, la finition végétale précultivée. Le surplus d’eau de pluie sera récupérée via des bacs récolteurs aux pointes vers lesquelles elle percole naturellement et envoyée vers une citerne.
L’isolation thermique
L’isolation thermique est réalisée matériaux d’origine végétale : panneaux de liège, panneaux de fibre de bois, chanvre en vrac et matelas de chanvre, à l’exception des tours de fenêtres de toit de l’étage qui sont moussés. L’objectif est un bâtiment basse énergie. La finition intérieure des murs est en enduit de chaux Argio®.
Le poêle de masse
Le poêle de masse était en cours de réalisation lors de la visite. Il est construit en briques de terre crue Argio®, extrêmement lourdes (très bonne inertie). La chaleur sera accumulée et restituée progressivement. Depuis lors, la première flambée a eu lieu : un véritable succès, avec la douceur de l’hiver, la consommation s’élève à une flambée de bois tous les deux jours pour maintenir une température de confort entre 18° et 21°.
L’escalier
Un escalier sculpté en frêne et poteaux écorcés en châtaigner mène au premier étage. Il a été réalisé sur mesure par une artisane du sud de la France avec les chutes de chantier (poteaux) de ses frères charpentiers. Le plancher qui surplombe le rez est en sapin (et pas en osb, comme c’était prévu par l’entrepreneur d’origine) pour être beau vu d’en bas. Il est ajouré pour permettre au bois de bouger et à la chaleur du poêle de monter.
L’esprit d’équipe
L’auto-constructeur doit s’investir solidement dans son projet, c’est évident mais, au-delà de cet investissement, il est confronté à d’autres freins comme :
- la difficulté d’obtenir de bons prix,
- la recherche de conseils techniques judicieux,
- l’hésitation des entrepreneurs à intervenir sur ce type chantier
- ...
Or le maître de l’ouvrage a tenu à souligner que, pour la Maison Pomme de Pin, au-delà du lien contractuel avec le fournisseur ou les entrepreneurs, une véritable relation s’est créée entre les intervenants. Le chantier a été mené comme un partenariat, parfois fondé sur une amitié de longue date.
Une expérience audacieuse pour ces propriétaires d’une maison extraordinaire en matériaux durables qui n’hésitent pas à retrousser leurs manches pour vivre leur rêve et vous le faire partager sur leur blog.
Sources :
- Compte rendu de la visite de la Maison Pomme de Pin, portes ouvertes Ecobâtisseurs, circuit ‘Eco-matériaux’, organisé par le cluster Eco-construction asbl dans le cadre du projet européen Greenov, le 11/11/2013, Grez-Doiceau
- maisonpommedepin.blogspot.be, nenuphar.be, ecobatisseurs.be
Source des illustrations : photos réalisées lors de la visite. Leur utilisation n’engage en rien l’auteur/les propriétaires sur un soutien ou un entérinement éventuel du contenu de l’article.