L’influence de la civilisation romaine se fait sentir encore de nos jours. Leurs monuments, vestiges d’une architecture élaborée et symbolique, attirent des milliers de touristes. Depuis longtemps, leurs techniques constructives ont été étudiées, certaines ont été percées à jour plus vite que d’autres. La longévité de leur béton restait encore un mystère malgré quelques indices. Le dernier secret vient d’être révélé : il s’autorépare. 

Béton

L’architecte Vitruve qui vivait au 1er siècle avant JC nous a transmis des recettes de fabrication. Pourtant, les scientifiques d’aujourd’hui se penchent toujours la longévité du béton fabriqué à l’époque. Ils se demandent même sur quelle part d’aléatoire ou de savoir s’appuyait la technologie. Les romains avaient-ils seulement conscience de la qualité exceptionnelle de leur matériau ? Leur béton a traversé l’histoire, même dans des conditions extrêmes (milieu salin, par exemple). Sa composition a chimiquement évolué dans le temps sous l’action de l’eau, qu’elle soit pluviale ou souterraine. Par comparaison, le nôtre semble si éphémère et fragile. S’en inspirer pour améliorer les bétons contemporains est le défi que se sont lancé les chercheurs. 

Plusieurs hypothèses ont déjà été émises sur sa composition et les réactions chimiques qui en découlent.  

  • En 2017, des scientifiques de l'Université de l'Utah ont pointé le rôle de l’eau de mer dans le renforcement du béton en réaction avec des cendres volcaniques. 
  • En 2020, le Massachusetts Institute of Technology (MIT – USA), en partenariat avec l'Université de l'Utah, a confirmé l’importance des roches volcaniques (pouzzolane) dans le processus de cohésion sur le long terme. 

Les techniques d’investigation deviennent de plus en plus performantes tant en imagerie à haute résolution qu’en cartographie chimique. 

Un nouveau résultat d’étude vient d’être annoncé que l’on doit encore au MIT. Les romains semblent avoir utilisé de la chaux vive dans leur mélange et ce, volontairement pour en accélérer la prise.

Autre avantage, ce calcium provenant d’un mélange à haute température est réactif. Il se dissout facilement l’eau qui percole à travers les fissures avec deux conséquences : 

  • une recristallisation spontanée par saturation qui comble la fissure; 
  • une réaction naturelle avec les agrégats volcaniques qui renforce la cohésion.

Autres techniques

Maçonnerie

Au cours de la longue période romaine (plus de 500 ans), la technique de construction des murs a évolué, passant d’un empilement de pierre sèches et d’un assemblage de briques de terre crue à des réalisations plus complexes de béton et briques de terre cuite.

  • Les murs les plus anciens dits cyclopéens étaient constitués d’un entassement de pierres brutes sans liant. Les murs moins massifs étaient en terre, constitués de briques d’adobe à partir d’un mélange constitué, principalement, de sable, d’argile, d'eau et de fibres (paille, …) le tout séché au soleil.
  • La taille des pierres permet par la suite un appareillage plus précis, solide et esthétique à la fois ce qui était fort apprécié. Les romains mettent au point la recette de leur « miraculeux » béton ce qui ouvre d’autres opportunités constructives sous forme de blocs coulés dans des moules en bois. Leur assemblage donnait une surface irrégulière qui a nécessité une réflexion sur la finition.
  • C’est ainsi que se développent des murs pleins et mixtes : parement en pierre et, par la suite, de briques avec intérieurs en béton. Le choix des parements (briques rondes, pyramidales, …) varie avec le temps et la situation géographique, l’empire étant immense .
  • Les romains ont même exploré une technique d’ossature bois avec un remplissage de pierres maçonnées, très similaire au colombage que nous connaissons.

Vous trouverez plus de détails et des schémas dans l’article d’Archdaily via le tweet ci-dessous.

  

Signalisation

L’information est peut-être anecdotique mais son ingéniosité mérite d’être signalée. Nous sommes à Pompéi. Dans une rue, de petits cailloux blancs sont coincés entre les dalles de pavage. Plusieurs hypothèses ont été évoquées dont l’esthétique. L’une d’elles est que ces pierres de quartzites, laiteuses, réfléchissent/accentuent la lumière. Un marquage fluorescent avant l’heure.

 

Equipements techniques et infrastructures

Prenons l’exemple des bains publics. Ils se développent en Occident à l’époque romaine associés à une série des services tels qu’on pourrait le concevoir actuellement (piscines, bibliothèques, restaurants, …). Les ensembles les plus imposants pouvaient accueillir plus de 3000 personnes. Mais qui dit bain dit eau : alimentation, distribution, chauffage, évacuation. Tout ce système sanitaire requiert des infrastructures adaptées : aqueducs, salle de chauffe, égouttage voire récupération.

5324-pont-du-Gard-by-Bernard-bill5-_commons-wikimedia.jpgQu’ils soient aériens ou, le plus souvent souterrains, les vestiges d’aqueducs sont parvenus jusque nous, impressionnants, tels le pont du Gard en France ou, chez nous, à une échelle plus modeste l’aqueduc de Mettet en province de Namur.

De plus, ces établissements, ainsi que les installations résidentielles privées, disposaient d’un système de chauffage par le sol appelé hypocauste, où de l’air chauffé est mis en circulation dans un vide aménagé sous un radier en briques. 

 

A n'en pas douter, les romains sont et restent de grands bâtisseurs avec une maîtrise technologique qui nous étonne encore.

 

 

Sources : 
- « Hemp Concrete: From Roman Bridges to a Possible Material of the Future », Eduardo Souza, 30/07/2020, www.archdaily.com 
- « 2,050-year-old Roman tomb offers insights on ancient concrete resilience », Department of Civil and Environmental Engineering, 08/10/2021, news.mit.edu 
- « On sait (enfin) pourquoi le béton des Romains est aussi résistant », Nathalie Mayer (Journaliste), 07/01/2023, www.futura-sciences.com 
- « How were the Walls of Roman Buildings Constructed ? », Eduardo Souza, 19/03/2020, www.archdaily.com 
- « 50 Construction Terms & Concepts All Architects Should Know », Dima Stouhi, 25/03/2022, www.archdaily.com 
- « From Bathtubs to Showers: How People Have Bathed Throughout History », Giovana Martino (traduction Diogo Simões), 17/01/2023, www.archdaily.com
- « Hypocauste », fr.wikipedia.org
- « Aqueduc », fr.wikipedia.org
- www.enserune.fr 
Source des photos utilisée à titre d’illustration :
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- « Pont du Gard », Bernard bill5, 25/12/2004, Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license, commons.wikimedia.org