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logo-valideoLe but de la performance énergétique des bâtiments, telle que préconisée par la Directive Européenne est d'en réduire la consommation d'énergie primaire.
Mais rappelons qu'elle ne représente qu'une partie seulement d'une conception « durable ». Il est possible d'aller beaucoup plus loin, en prenant en compte tous les aspects des rapports entre un bâtiment et son environnement (confort, maintenance, gestion des déchets, de l'eau, de la végétation, du bruit...) et le coût global de ces rapports multiples, aussi bien à l'investissement qu'en cours de fonctionnement.

C'est l'objectif des systèmes volontaires de certification, telles que le VALIDEO belge, le HQE français et le BREEAM britannique...

Une philosophie de la certification ?
Il ne s'agit pas d'une réglementation, ni d'un label, mais d'une démarche volontaire de gestion de la qualité environnementale des opérations de construction ou de réhabilitation du bâtiment.
Elle permet d'évaluer et d'objectiver la performance globale d'une construction, sur base de cinq thèmes principaux :
-site et construction (relations du bâtiment avec son environnement, choix intégré des produits)
-gestion (énergie, eau, déchets, entretien et maintenance)
-confort (hygrothermique, acoustique, visuel, olfactif)
-santé (qualité sanitaire des espaces, de l'air, de l'eau)
-valeur sociale (soin apporté au cadre de vie, à la circulation dans et aux alentours du bâtiment, à la mobilité par rapport aux transports en commun,  à l'accessibilité des personnes à mobilité réduite)
Elle soutient le processus du concept et de l'exécution, par une expertise progressive, et stimule l'amélioration de la qualité intrinsèque du bâtiment, à toutes les étapes de sa durée de vie.
Elle vise un retour financier rapide (économies d'énergie et de maintenance à l'exploitation), en valorisant la qualité, le confort, l'impact social et environnemental.

Des similitudes entre les différentes certifications européennes ?
Pour les critères suivants, les démarches VALIDEO, HQE et BREAAM sont très proches: consommation d'énergie et d'eau, gestion des déchets, impact du bâtiment sur son environnement, gestion et maintenance du site. Aucune des démarches ne prend en compte le critère de performance économique des immeubles, excepté le BREEAM.
En outre, certaines ont fait l'objet de critiques: par exemple, son manque de lisibilité et sa défense des intérêts des industriels à la dénomination HQE qui en effet appartient à l'AIMCC, le syndicat des fabricants de produits de construction. HQE a d'ailleurs fait l'objet d'un dépôt de marque commerciale par l'association du même nom. Ces critiques ont amené certains à préférer la certification britannique BREEAM, portée par le Building Research Establishment, une institution fondée par les autorités anglaises. C'est oublier un peu vite que le BRE est à présent un charity(organisation de financement d'œuvres caritatives) très proche du secteur de la construction du Royaume-Uni .

Des enjeux pour la certification ?
Si elle accroît la valeur locative et la valeur du capital, Il n'existe, actuellement, aucune méthode pour établir la valeur financière de la « durabilité » d'un bâtiment.
En ce qui concerne l'économie d'énergie, aux prix actuels, le bénéfice économique d'un bâtiment certifié est marginal par rapport à un bâtiment traditionnel. Ceci pourrait toutefois rapidement changer lors de la prochaine et prévisible surchauffe des prix pétroliers. Les avantages actuels se situent donc plus en termes d'image, de valeur de marché et de fidélisation d'un personnel.
Enfin, en ce qui concerne le surcoût d'un bâtiment durable, il peut être nul si l'on accepte un niveau de confort légèrement inférieur en été, et égal à +10%, si l'on vise un niveau de confort égal à celui d'un bâtiment traditionnel. Quoi qu'il en soit, en dépit de l'effet des avantages objectifs et des surcoûts, il ressort des tendances actuelles que la grande majorité des preneurs de bail demandent des bâtiments certifiés.

Des limites à la certification ?
Tous les acteurs ne pourront pas s'engager dans ce type de démarche (elle est relativement lourde et requiert un know-how important).
La différence se fera sur la capacité d'un développeur ou d'un maître d'ouvrage de rendre le durable « désirable ». Si la durabilité immobilière se contente de gérer des paramètres techniques, elle sera stérile et ne provoquera guère d'aspiration dans le chef des occupants potentiels, qui se demanderont si le bâtiment « certifié » respecte leur qualité de vie.
C'est la question que commencent à se poser les employés de Prisma Presse, installés depuis avril 2011, à Gennevilliers, dans des immeubles certifiés HQE. Pour réduire la consommation énergétique en favorisant l'éclairage naturel, les concepteurs ont rapprochés les fenêtres des bureaux, en plaçant une double circulation, soit 6000m² de couloir (le ¼ de la surface totale !). Qui a parlé d'optimalisation des surfaces? La question ne s'arrête pas là, puisque depuis leur installation, les salariés se plaignent de trop d'éclairement. En effet, l'ensoleillement, au poste de travail, est si fort que les stores ne suffisent pas à le parer. Dès lors, le site s'est équipé de climatisations qui vont contre l'orientation écologique du bâtiment !

Une autre approche de la certification ?
Difficile de faire admettre, au personnel d'une entreprise, que l'avenir de la planète pourrait bien passer avant notre confort personnel. L'exemple de la luminosité imprévue de l'éclairage naturel nous montre bien que le dispositif n'a pas été pensé dans une vision globale, prenant en compte le bâtiment et son usage. En favorisant l'environnement au détriment de l'humain, on déshabille Paul pour habiller Pierre et on n'a pas avancé d'un pouce.
Peut-on être heureux dans un immeuble certifié ?
C'est la question que doivent se poser les constructeurs, et qui demande une concertation entre tous les acteurs de l'acte de bâtir, du concepteur à l'utilisateur. En tous les cas, Il faut conserver, à un immeuble certifié,  une dimension « désirable », afin que ces occupants potentiels aient « envie » du bâtiment, comprennent la démarche et acceptent les comportements respectueux de l'environnement, qu'elle induit.

Sources
www.valideo.org: VALIDEO
www.assohqe.org: La certification Démarche HQE®
www.profacility.be: Pro-building - certification des bâtiments : « objectiver le durable »  Patrick BARTHOLOME – profacility magazine – mai 2010
www.lejournaldelarchitecte.be: France : les conséquences absurdes d'un immeuble HQE - journal de l'architecte n°250 -  juin 2011